Hommage à Patrick Baumann
- Par croquignole
- Le 20/12/2024
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Hommage à Patrick Baumann (15 mars 1961-14 décembre 2024)
Patrick Baumann, fondateur du laboratoire Spagyros vient de nous quitter.
Patrick a été un acteur important pour la spagyrie en Suisse. C’était aussi un ami que j’ai rencontré grâce à mon amie Nelly Stoll, très proche de Patrick et spécialiste de la Spagyrie. J’ai raconté notre première entrevue ici https://atelier-spagyrie.e-monsite.com/blog/spagyrie-medecines-alchimiques/la-spagyrie-en-suisse.html.
Son parcourt est très intéressant pour comprendre la spagyrie aujourd’hui en Suisse, sans lui, le décor serait sans doute différent.
À 20 ans, dans le cadre de ses études linguistiques, Patrick Baumann, germanophone, découvre Paracelse et la Spagyrie. Il réalise dans son laboratoire de cuisine un élixir de chélidoine et guérit son psoriasis persistant. Convaincu et pris de passion pour Paracelse et la spagyrie, il développe ses recherches avec une pharmacienne (la spagyrie fait partie de l’environnement thérapeutique en Suisse et tous les pharmaciens et droguistes connaissent, et souvent utilisent la spagyrie). Swissmedic (l’organisme fédéral de contrôle des médicaments) le repère rapidement et une reconnaissance s’opère petit-à-petit (Non, Swissmedic ne commence pas d’abord par accuser Patrick Baumann de pratique illégale de la médecine et de la pharmacie, la loi est dure mais non aveugle). Un procédé Baumann est défini vers 2007 qui s’inspire du procédé de spagyrie dominant en Suisse, le procédé Zimpel. Le premier laboratoire est créé en Argovie, il s’appelle Herbalchym.
(ill. : Œuvres complètes de paracelse, bibliothèque de Patrick Baumann)
Spagyros
Le laboratoire « Spagyros » est créé à la ferme de la Malmaison (Jura) en 2009 qui rachètera Herbalchym (1). À cette époque Patrick Baumann cultive et « distille » environ 250 plantes. « Distiller » signifie ici familièrement « préparer spagyriquement ».
Patrick a toujours travaillé avec les plantes alors que les minéraux ne l’ont jamais vraiment intéressé. Ceux qui l’ont connus ont tout de suite remarqué son extrême sensibilité avec le monde vert, si doux et si proche des humains.
Le procédé Baumann
À la suite de Zimpel, le procédé Baumann consiste en une fermentation des plantes avec du sucre pour obtenir un alcoolat (le Mercure spagyrique) et une eau qui suit dans la distillation (le Soufre spagyrique). Les deux principes seront unis au cours d’une belle opération nommé « noces chymiques ». Les restes de la plantes seront calcinés pour être ajoutées à la teinture (l’union Soufre/Mercure) pour donner l’élixir. Cet élixir sera finalement dilué de façon à rendre son efficacité optimale.
Je vous ai décrit le procédé fondamental mais je n’ai pas pris le temps de vous décrire les mille détails qui transforment une simple opération de laboratoire en un procédé vivant et puissant. Les tours de mains et l’amour des opérateurs pour ce travail font toute la différence.
La spiritualité de la spagyrie
À l’image de Paracelse (1493-1541), qui est le maître de la médecine alchimique et le créateur de la spagyrie, Patrick basait son travail sur l’observation de la nature (« la lumière de la nature » comme il le faisait remarquer). La « spiritualité » n’entre pas directement ou formellement en compte dans le travail. Elle est incluse de facto dans l’art de vivre. Patrick ne proposait pas de grandes théories ésotériques dans la présentation de ses remèdes et sa spiritualité intime éclairait naturellement spagyros. Toutefois, une certaine ritualisation discrète qu’il ne partageait que très rarement animait le travail. Par exemple, les opérations de réunions des principes (les noces) se faisaient dans une petite salle spéciale, un genre d’oratoire, au cours d’une opération particulière qui incluait des prières que Patrick faisait pour les plantes, pour les malades, et pour l’humanité. La foi de Patrick était celle de Paracelse et sa pratique incluait une sensibilité mystique universelle. Toutefois, l’art du calendrier hermétique, dans le sens du calendrier lunaire popularisé par Rudolf Steiner par exemple, était utilisé au moins dans les travaux agricoles (je rappelle que Patrick et son équipe cultivait leurs plantes).
La ferme de la Malmaison
Depuis 2009, le laboratoire est installé à la ferme de la Malmaison à St. Brais en Jura (Suisse). Le laboratoire proprement dit est une salle de distillation (une quarantaine de têtes-de-maures sous vide de 10 litres environs). C’est le cœur du procédé. Mais l’essentiel est que ce laboratoire s’intègre dans un cadre agricole qui inclue des plantations, des salles de séchage, de fermentation et tout ce qui est nécessaire à une ferme traditionnelle (sans poules toutefois…). La spagyrie de Patrick Baumann commence vraiment avec les plantes, plantes sauvages de préférence, ou plantes qui sont cultivées en biodynamie le cas échéant.
La Société
Spagyros a été vendu à un grand groupe pharmaceutique (Patrick, minoritaire, n’avait pu empêcher cette cession) dont les buts et pratiques, aussi louables que puissent être les buts et pratiques de ces grands groupes financiers autant que philanthropiques, ne pouvaient pas toujours offrir à ces idéalistes de la santé que sont les spagyristes la liberté nécessaire à cet art de vivre sainement et il pouvait y avoir un écart entre la notion de création d’un élixir et celle de production au sens comptable. Patrick sera mis à la retraite d’office en 2023. Il est étonnant de constater qu’une infection de l’eau potable de la ferme fera son apparition avec le départ de son créateur. C’est peut-être cette longue infection qui emportera notre ami. L’autopsie qu’il a demandé le déterminera.
La Vie, pour les êtres vivants aussi sensibles que Patrick Baumann, se protège parfois en s’imposant, et souvent en quittant le jeu dès qu’il devient insupportable. Pourtant, la Vie elle-même continue, et l’œuvre de Patrick Baumann continuera avec ses successeurs et ses frères paracelsiens, à Spagyros et ailleurs…
La famille de Patrick était cette ferme et ceux qui la faisait vivre et je présente toutes mes condoléances et toute mon affection à ses amis et aux spagyristes en Suisse et dans le monde, avec des pensées particulières pour Nelly Stoll et Christian Etique qui ont accompagné son travail pendant des années.
Merci infiniment Patrick pour l’amitié naturelle que nous avons partagée pendant quelques courtes années et pour ce que tu partageais lumineusement.
Merci infiniment à Nelly Stoll pour m’avoir introduit dans le monde de Patrick Baumann et fait découvrir la spagyrie en Suisse, si particulière et si vivante.
Matthieu Frécon, Sarreyer, avant Noël 2024.
(1) Voir « des naturistes aux alchimistes » article paru dans l’Impartial 23/05/2009
Patrick Baumann Spagyros paracelse
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